C’est aussi à travers l’expérimentation vécue à la Grainerie qui oeuvre à l’émergence de jeunes créations que je m’interroge au coté des équipes artistiques sur la refondation du spectacle vivant.
Monsieur Bernard Latarjet
Mmes et Mrs Laurent Bayle, Abraham Bengio, Françoise Benhamou, Jacques Blanc, Bruno Boutleux, Alain Garlan, Dominique Goudal, Pascale Henrot, Fabien Jannelle, Robert Lacombe, Stéphane Le Sagère, Alain Meilland, Jacky Ohayon, Bruno Ory-Lavollée, Olivier Poubelle, Michel Sala, Jean-Marie Songy,
Aux acteurs culturels invités le 2 décembre à Toulouse
Monsieur,
J’ai bien noté confirmation, par courrier du vendredi 28 novembre, de votre invitation à participer à la journée du 2 décembre à Toulouse.
Je tiens tout d’abord à vous en remercier, cependant, après réflexion et bien des tiraillements, je ne me rendrai pas à ce rendez-vous. Je souhaitais par ce courrier, vous en exposer les raisons .
En premier lieu, et après une lecture attentive du contenu et des objectifs de votre mission, je ne peux que m’interroger sur :
La représentativité de la mission :
L’absence caractérisée d’artistes, de représentants de compagnies indépendantes, de lieux intermédiaires et même des publics dans la composition de votre équipe d’auditeurs-rapporteurs.
La présence d’un représentant du secteur des Musiques Actuelles suffit-il à garantir un élargissement des expériences ?
D’autres acteurs n’appartenant pas à un « premier cercle » auraient peut-être été une garantie nécessaire pour préparer, sous des angles de vues variés voire contradictoires, un véritable débat.
La méthodologie retenue :
Du débat, je retiens dans votre courrier le terme d’audition : à peine 1h de temps à au moins 8 personnes (qui n’ont pas été réunies au préalable pour défricher les chantiers proposés ) peut seulement sembler suffisant pour exposer les questions qui nous préoccupent.
Mais le véritable enjeu ne réside-t-il pas dans l’élaboration des solutions à proposer ?
Quand, où et avec qui les pistes de solutions seront-elles réellement débattues ?
Car, me semble t-il, c’est à partir du rassemblement d’idées que nous avancerons dans la résolution de la crise que nous connaissons.
La place de l’emploi :
Me paraît être une question centrale dans un débat portant sur l’avenir du spectacle vivant, pourtant aucune référence n’est faite au mouvement de lutte des « intermittents du spectacle », si ce n’est au travers d’un paragraphe relatif ... à la lutte contre les fraudes.
La crise des intermittents a pourtant mis à jour un malaise profond et la nécessaire remise à plat de nos modes de fonctionnement.
Mes interrogations sur l’utilité d’une telle journée ne doivent pas cacher nos préoccupations communes sur le fond :
Quelles sont les réelles conditions de la production et de l’emploi dans le spectacle vivant : Exemple de production Plan B (10 intermittents, 0 permanents) : 48 000 €, charges comprises, soit 23% du budget de création ont été dégagés pour les répétitions (2 mois rémunérés pour 4 comédiens, 1 chargé de production et 1 régisseur plateau) ; Les indemnités de chômage ont donc participé à hauteur estimée de 96 000 € (4 mois de répétitions non rémunérées).
Quelles seront les conséquences de l’application de la réforme du régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle sur nos compagnies ? Régime qui, de surcroît, sera à nouveau « négocié » dès 2005 !
Quels sont les outils mis en place pour en étudier les répercussions concrètes ?
Quelle réflexion sur un plan social d’accompagnement ?
Sur la question de décentralisation :
Comment avancer sur la question du nécessaire rééquilibrage financier des aides à la création sans s’enfermer dans la seule réalité « saupoudrage » et/ou « concentration de moyens » sur des compagnies répondant au critère d’excellence ? Car la question reste entière de faire ou non le choix d’accompagner le vivier artistique de notre pays .
C’est aussi à travers l’expérimentation vécue à la Grainerie qui oeuvre à l’émergence de jeunes créations que je m’interroge au coté des équipes artistiques sur la refondation du spectacle vivant.
La décentralisation devra, quelle que soit la répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités locales, s’accompagner de moyens conséquents pour la culture.
L’ensemble du système est aujourd’hui adossé à l’intermittence. Les collectivités locales prennent déjà en charge près des 2/3 des coûts nécessaires à la création, à la diffusion et à la formation. Les moyens sont encore insuffisants.
Quels seront le rôle, les moyens et les responsabilités des DRAC ? Un accompagnement des collectivités locales et territoriales sera sans doute nécessaire pour préparer à de nouvelles compétences.
Quel crédit accorder à un débat national, pourtant si nécessaire, quand notre gouvernement agrée un protocole dénoncé par l’ensemble des représentations professionnelles ?
Comment entamer une concertation, lorsque le dialogue social n’est pas souhaité par les différents partenaires.(le Medef pour qui « moins de social =moins de charges », JJ Aillagon qui regrettait qu’il y ait trop d’artistes en France) ?
J’aurais préféré être associé, par l’intermédiaire du SNFAC dont je suis membre, du SYNAVI, et par d’autres représentations professionnelles, à la définition même du cadre, des échéances et des modalités de votre mission.
Je fais partie de celles et ceux qui, avec les équipes artistiques, au lendemain d’un été plus que désastreux, croyions encore avoir le temps, les forces vives et les compétences pour participer à un véritable débat afin d’énoncer des pistes de travail constructives.
Je vous remercie de votre attention, et vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes meilleurs sentiments,
Florence Meurisse,Administratrice de production
Acolytes, 82 route de Castres 31130 Balma